2011
Faire bouger les lignes...
Le cinéma montre le monde. Reflet d'une société en mouvement, comme on l'entend souvent, le cinéma semble l'année passée s'être plutôt acharné sur l'immobilisme, l'incompétence de l'humain à améliorer ses aptitudes à respecter un environnement, à aimer l'autre, voire même à s'aimer soi-même. Dans ce maelström continu qu'est le cinéma, on aime à se repérer par rapport à des piliers, ces grands cinéastes, dont on connait les visions, et qui d'ordinaire ne bougent pas. Les plus grands cinéastes de notre époque semblent pourtant se plier à l'air du temps, et de nouveaux viennent sans peine s'y ajouter. Cependant, ils plient sans rompre: ils filment donc des natures de plus en plus exsangues, des caractères de plus en plus ténus, des tourments sous des airs de fête. Le rêve et la douceur ont étés remplacés cette année par une certaine noirceur globale, un contexte sans cesse ancré dans une gravité qui n'en démord pas. Nous avions une approche du monde, voilà que les cinéastes de tous horizons la questionne, et nous amènent à penser l'instable et à découvrir l'indéfini. Questionner le déterminisme, penser la fin d'un monde, remettre en question l'ordre, raisonner les luttes présentes et passées, en préparant celles du futur, interroger nos racines, repenser l'héroisme en le rendant ordinaire, le tout en gardant à l'esprit cette note d'espoir. Telles semblent avoir étés les missions que le bon cinéma s'est donné en 2011. Retour rapide sur une assez belle et plutôt riche année de cinéma.
200 films vus
dont
6 documentaires
16 films d'animation
54 comédies
64 drames
25 comédies dramatiques
35 films d'autres genres (thrillers, biopics, polars...)
et dont
17 films 4 étoiles
48 films 3 étoiles
72 films 2 étoiles
56 films 1 étoile
et 7 films 0 étoiles.
2011 EN 10 ACTRICES
Marina Foïs et Karin Viard. Polisse.
Golshifteh Farahani. Si tu meurs, je te tue.
Tilda Swinton. We need to talk about Kevin.
Lubna Azabal. Incendies.
Sibel Kekilli. L'étrangère.
Natalie Portman. Black Swan.
Clotilde Hesme. Angèle et Tony.
Sareh Bayat. Une séparation.
Marie-Josée Croze. Another silence.
2011 EN 13 ACTEURS
Vincent Lindon. La permission de minuit, Pater, Toutes nos envies.
Colin Firth. Le discours d'un roi.
Antonio Banderas. La piel que habito.
Jean Dujardin. The Artist.
Peyman Moadi. Une séparation.
Michel Piccoli. Habemus Papam.
André Wilms. Le Havre.
Sean Penn. This must be the place.
Olivier Gourmet. L'exercice de l'Etat.
Mel Gibson. Le complexe du Castor.
Ewan McGregor. Beginners.
Philippe Torreton. Présumé coupable.
Miki Manojlovic. Cirkus Colombia.
2011 EN 3 BOUILLES
Zoé Héran. Tomboy.
Thomas Doret. Le gamin au vélo.
Asa Butterfield. Hugo Cabret.
2011 EN 10 REALISATEURS
Pedro Almodovar, La Piel que Habito.
Terrence Malick, The tree of life.
Nuri Bilge Ceylan, Il était une fois en Anatolie.
Asghar Farhadi, Une séparation.
Darren Aronofsky, Black Swan.
Alain Cavalier, Pater.
Nanni Moretti, Habemus Papam.
Aki Kaurismäki, Le Havre.
Denis Villeneuve, Incendies.
Robert Guédiguian, Les neiges du Kilimandjaro.
2011 EN 5 REALISATRICES
Céline Sciamma, Tomboy.
Maïwenn, Polisse.
Lynne Ramsay, We need to talk about Kevin.
Nadine Labaki, Et maintenant, on va où?
Lucy Walker, Waste Land.
2011 EN 10 SCENARISTES
Pedro et Agustin Almodovar, d'après l'oeuvre de Thierry Jonquet. La piel que habito.
Asghar Farhadi. Une séparation.
David Seidler. Le discours d'un roi.
Mark Heyman, Andres Heinz et John J.McLaughlin, d'après l'oeuvre de Andres Heinz. Black Swan.
Hiner Saleem. Si tu meurs, je te tue.
Lise Macheboeuf et Raphaël Jacoulot. Avant l'aube.
Anik Le Ray, Jean-François Laguionie. Le tableau.
Robert Guédiguian et Jean-Louis Milesi. Les neiges du Kilimandjaro.
Lynne Ramsay, Rory Kinnear, d'après l'oeuvre de Lionel Shriver. We need to talk about Kevin.
Federica Pontremoli, Francesco Piccolo, Nanni Moretti. Habemus Papam.
2011 EN 5 REVELATIONS MASCULINES
Ezra Miller. We need to talk about Kevin.
Pierre Niney. J'aime regarder les filles.
Grégory Gadebois. Angèle et Tony.
Nicolas Maury. Let my people go!
Maxim Gaudette. Incendies.
2011 EN 5 REVELATIONS FEMININES
Jessica Chastain. The tree of life, La couleur des sentiments, Killing fields.
Lola Créton. Un amour de jeunesse.
Elena Anaya. La piel que habito.
Naidra Ayadi. Polisse.
Alice Barnole. L'apollonide.
2011 EN 10 SECONDS ROLES
Helena Bonham Carter et Geoffrey Rush, Le discours d'un roi.
Evelyne Didi. Angèle et Tony et Le Havre.
Noémie Lvovsky. L'apollonide, Le skylab, Présumé coupable, 17 filles.
Biyouna. La source des femmes.
Anne Le Ny. La brindille et Intouchables.
Frédéric Pierrot. Polisse et La guerre est déclarée.
Sylvie Testud. Avant l'aube.
Mylène Demongeot. Si tu meurs, je te tue.
Denis Podalydès. Omar m'a tuer.
2011 EN 2 APPARITIONS
Adrien Brody, en Dali dans Minuit à Paris.
Pierre Niney, en serveur attentif dans Les neiges du Kilimandjaro.
2011 EN 8 PREMIERS FILMS
Angèle et Tony, d'Alix Delaporte.
Women are heroes, de Jr.
Arietty, de Hiromasa Yonebayashi.
Medianeras, de Gustavo Tarreto.
Les adoptés, de Mélanie Laurent.
Oxygène, de Hans Van Nuffel.
Abel, de Diego Luna.
J'aime regarder les filles, de Frédéric Louf.
2011 EN 10 BO ET CHANSONS
Alexandre Desplat. Le discours d'un roi, The tree of life, HP7.
La bande originale de Pina.
La bande originale de La guerre est déclarée.
Moby. Waste land.
Cécile Corbel. Arietty et le petit monde des chapardeurs.
Massive Attack, Jean-Gabriel Becker, Outlines et Patrice Bart Williams. Women are heroes.
Clint Mansell. Black Swan.
Kavinsky, "Night call", dans Drive.
Para One, "Always", dans Tomboy.
Syd Matters, "I might float", dans Les adoptés.
2011 EN 5 AFFICHES
2011 EN 20 MOMENTS INOUBLIABLES
1. Alors que tout était baigné dans l'obscurité jusqu'alors, apparait une éclaircie, une femme qui apparait dans ce film nocturne et masculin. Une grâce ténue mais infinie s'impose alors. Il était une fois en Anatolie se grave.
2. En épingle monte une colère, en deux femmes, Karin Viard et Marina Foïs. S'il n'y avait qu'une seule scène à retenir de Polisse, ce serait sans doute celle-là, d'une violence incroyable, et d'une justesse éblouissante.
3. En arrière, un cygne noir se penche, et tombe. Natalie Portman en apothéose, la perfection absolue, c'est Black Swan.
4. Un chant magique résonne, nos yeux s'embuent. Le petit garçon qui ne mentait jamais à fait se taire la jument qui chantait. Les larmes de l'année, on les tient devant ce court-métrage absolument magique des Contes de la nuit.
5. Une femme court à perdre haleine, tenant son enfant dans ses bras. Un choc, une balle, et un enfant est tué. Fin d'une chute, le spectateur est étouffé, pris d'une atroce douleur. Ainsi se termine L'étrangère, nous laissant par la même occasion un souvenir indélébile.
6. Au beau milieu de décombres, d'une communauté entière de chiffoniers, une cuisinière fait ce qu'elle peut avec ce qu'elle trouve. Et balance à la gueule du spectateur une affirmation qu'on est pas près d'oublier: "on se sent bien ici". Une baffe, toute la vérité du monde sortie d'une femme digne et humble. Un documentaire vibrant à son image: Waste Land.
7. Sous la pluie, une étrangère qui prend racine, après avoir pris la fuite. A la beauté de cette fugue parisienne nocturne s'ajoute le charme intense de Golshifteh Farahani, qui laisse la pluie rendre son tee-shirt transparent, et qui laisse la vie faire couler ces larmes. Magnifique manière de clore le très surprenant Si tu meurs, je te tue.
8. 1+1=1. Une violente et déboussolante révélation, une équation qu'on gardera en mémoire longtemps tant son impitoyabilité est grandiose dans Incendies.
9. Une femme arrive dans une boutique de vêtements. Elle raconte sa vérité, et retrouve une soeur et une mère qui l'avaient connu homme. Des retrouvailles poignantes, sublimées par Almodovar, La piel que habito.
10. Et maintenant, que fait-on de ce cercueil, dont l'occupant n'est ni musulman ni chrétien? Dans quelle partie du cimétiere l'enterre-t-on? Ou, en l'espace d'une question, un film prend tout son sens et donne à son propos toute son envergure. Ou qu'est-ce qui fait que Et maintenant on va où? devient un film important.
11. Un état d'esprit comme reposé, une sensation enivrante d'apesanteur, qui nous suit plusieurs heures. C'est ce que nous laisse The Tree of Life, film plein et très riche, odyssée sublime et mystique.
12. De retour de l'hopital, on observe, subjugué par une poésie de l'absurde et du quotidien, un cerisier en fleurs. Puis on retourne faire la cuisine. C'est la poésie sur laquelle nous laisse Aki Kaurismaki, à la fin du Havre. Et le geste est beau.
13. Un bar, une femme perdue par un problème qu'elle nomme "la vie". Et un barman, que l'on retiendra longtemps, qui illumine un film par sa présence, et qui amène une première solution aux problèmes de cette femme, en l'écoutant. Un morceau de poésie, une scène culte des Neiges du Kilimandjaro.
14. La simplicité d'une rencontre, la beauté d'un apprivoisement. Dans une fuite finale, qui cristallise cette beauté, un couple échappe pour un peu aux conventions, et admire le charme de ce qu'on appelera leur vie. De quoi tomber amoureux d'Angèle et Tony.
15. Une toute petite fille, au coeur bien trop large pour son corps, dit adieu à un jeune garçon malade, qu'elle a accompagné. Arietty, ou la magie d'un adieu doux, qui laisse rêveur. Toute la splendeur des studios Ghibli.
16. Autour de moi, une quinzaine de personnes. A l'écran, l'apparition de Dali, sous les traits de Adrien Brody. Rhinocéros. Le mot est dit, et je pars dans un mémorable fou rire. Autour de moi, quinze personnes excédées par mon rire, dix minutes ininterrompues, et quelques unes de plus pour m'en remettre. Un excellent souvenir, un Dali gravé en moi, et même quand j'y repense, ça me fait sourire. Minuit à Paris, rien que pour cela il fallait le voir.
17. Des Pafinis qui ont ramené des pots de peinture. Alors que l'artiste avait laissé un bout de leur corps sans couleur, ils décident de se donner la personnalité qu'ils veulent, en se peignant eux-mêmes. Se donner une identité, se teindre en un assemblage de couleurs qui nous ressemblent. La solution la plus innovante, poétique et inattendue de l'année nous est offerte dans ce Tableau.
18. Un chat qui s'envole, et qui rêve d'un Jérusalem réuni. Si le film est plutôt mauvais, on en retiendra tout de même ce rêve du chat, sur une musique magnifique. Assurément le rêve de l'année, dans ce Chat du rabbin peu vivant.
19. Un cochon ne peut pas mettre les pieds en Israël. Les scènes cocasses s'enchaînent et on retiendra ici l'affolante absurdité de l'année, qui cristallise ainsi l'absurdité d'un conflit sans nom depuis 1948. Le cochon de Gaza.
20. Une voiture fait des tours de piste. A n'en plus finir. Et, désarçonnés, on commence à s'ennuyer. Sans savoir qu'on s'ennuiera tout le long du film, pub insensée pour des voitures, des hôtels, des compagnies aériennes. Sofia Coppola se perd totalement, mais marque au moins les esprits. L'ennui et l'énervement qu'ont suscités Somewhere sont inoubliables!