COUP DE BLUES
La conclusion bien faible d'une trilogie dont il ne faut retenir que le premier opus, un film totalement inutile et sans intérêt sur, à ce qu'il paraît, la jeunesse d'aujourd'hui et une « comédie » honteuse pleine de clichés sur l'interculturalité. Les trois films indigestes du mois d'octobre...
ARTHUR 3: LA GUERRE DES DEUX MONDES, de Luc Besson.
40%
Après un très bon premier épisode qui nous introduisait dans le charmant monde des Minimoys, Luc Besson accouchait l'année dernière de son deuxième épisode, ridiculement vide et sans surprises, dont le contenu aurait pu être compilé à 20 minutes de film. Et puis surtout, le second opus se terminait par: A suivre...Et voilà qu'un an plus tard, on a la fin des épisodes d'Arthur. Et on espère sincèrement que ça va s'arrêter là. Première remarque: les deux derniers épisodes auraient facilement pu faire un seul film, qui plus est un film intéressant s'il avait été, en plus, retouché et réécrit dans sa totalité. Ensuite, on ne s'épandra pas longuement au sujet de ce film sans surprise et à peine distrayant, mais on dira juste que Besson se loupe sur toute la longueur du film. On se dit qu'on aurait aimé qu'il ne fasse qu'un seul opus, en l'occurrence le premier. Tout est raté: le son, pitoyable, qui saute aux oreilles, un mixage des voix digne d'un amateur (franchement, quand Malthazard, à voix très faible, demande à la foule de se taire, qu'elle se tait directement, et qu'il leur parle sur le même ton très faible, c'est risible), des décors dont on voit par trop l'artificialité, et surtout une horrible bande originale, qui atteint le summum du ridicule lors de ce dernier morceau (le fils de Malthazard, Darkos, fonde un groupe de rock, et c'est juste inécoutable).
Et puis surtout, Besson déçoit fortement sur son scénario: quelle paresse, que de mettre à plusieurs reprises des raccourcis simplistes et remettant en cause l'entièreté de son histoire. Par exemple lorsque Arthur se souvient - bingo -, que son grand-père cache une fiole qui lui permettra de grandir, à la manière de Malthazard, pour lui permettre de revenir dans le monde des vivants, et de le combattre. S'il avait pensé à cette fiole avant, il aurait pu faire grandir tous ses amis et faire que chacun puisse vivre pénard, sans avoir cette question de « jamais je ne reverrai mes amis Bétamèche et Sélénia. Et puis, quelle imbécile cette Sélénia, que l'on voit s'évertuer à enlever du sol une épée dont on sait parfaitement que seul Arthur peut l'enlever. Bref, un scénario qui prend son public pour des cons. Et ainsi, si Besson nous donne une imagerie parfois rigolote (les scènes de train ou quand Malthazard marche dans la ville), et qui ne manquera pas d'amuser les enfants (le film ne devrait cependant pas les marquer tant il est vide et décousu), il nous donne tout de même le pire de son cinéma commercial et touche le fond en concluant une trilogie tombée de haut.
LA VIE AU RANCH, de Sophie Letourneur.
36%
Les inrocks: « portrait aiguisé d'une bande de filles bien contemporaines par une jeune cinéaste douée ». Télérama: « le film se clôt sur une note plus douce, subtilement mélancolique, celle de l'âge de raison ». Libération: « miracle d'immédiateté et d'anodin jouissif ». Forcément, ces lectures donnent envie. Alors on y va, avec plaisir et comme a-priori une réalisation subtile et représentative d'une génération de meufs. Quelle déception, et quelle chienlit... Première réalisation d'une jeune femme, Sophie Letourneur, qui ne semble pas vouloir faire du cinéma classique: la caméra semble comme lâchée en pâture dans une jungle de mots anti-cinématographiques au possible, le son est criard et totalement confus, la mise en scène est invisible et tente de déconstruire le scénario. Le scénario, il ne semble pas y en avoir, tant l'envie de la réalisatrice était de laisser ses comédiennes jouer et improviser des scènes. Et voilà, le défaut du film est là: c'est tellement inintéressant qu'on décroche totalement, je n'ai pas eu un seul rire, si ce n'est un rire nerveux. Si ces jeunes filles, à en lire les critiques, représentent vraiment la génération d'aujourd'hui, on est pas dans la panade pour demain! Alors, peut-être, du haut de mes tout frais 18 ans, que je n'ai pas assez de recul pour apprécier la témérité et la frivolité de ces jeunes bourgeoises censées représenter la jeunesse, mais en tout cas, je ne vois pas du tout ça comme ça. Les jeunes semblent être ici des inconséquents à la botte de l'argent de leurs parents, des cerveaux disponibles uniquement pour les plans culs. Et à aucun moment, bien sur, il n'est question des grandes réflexions personnelles d'une jeunesse qui se recherche.
Et c'est terriblement chiant, parce qu'on assiste totalement déconfits à un bal des égos qui cherche à déterminer qui va coucher avec qui, qui a la légitimité pour coucher avec untel, et qui veut venir au ranch (un appart parisien en colocation). Le film est extrêmement refermé sur lui-même, jamais drôle ni attachant tant il est moche. On aurait aimé pouvoir saluer l'incroyable naturel des comédiennes, mais le film est si médiocre qu'on préfère l'oublier et passer à autre chose.
IL RESTE DU JAMBON?, de Anne Depetrini.
21%
Il m'est très rare de sortir aussi énervé d'une projection. Vous me direz, il n'y a absolument pas lieu ici de critiquer de mauvaises intentions. Effectivement, les intentions de la réalisatrice peuvent être, au départ, très bonnes: retransmettre sur grand écran un esprit canal avec le Ramzy de H, elle-même qui a présenté la météo loufoque il y a de ça quelques années, le co-scénariste qui se trouve être également co-auteur des Guignols sur la chaîne cryptée. Mais l'esprit potache de Canal n'est jamais au rendez-vous, Anne Depetrini essaye de se défaire de la bonne conscience anti-raciste, et, du coup, ne rachète jamais son scénario d'imbécilités racistes honteuses et de clichés dépassés et totalement irrespectueux du public et de ceux qui pourraient être les personnages du film.
En fait, Il reste du jambon?, est un film prétentieux, lourd et méprisant. Prétentieux parce qu'il se croit tout permis: il déploie un arsenal de répliques toutes aussi débiles les unes que les autres. Pour autant, le film ne semble pas vouloir se racheter et, si le second degré est évidemment palpable, jamais de premier degré dans le film, ce qui fait que le film tombe dans tous les clichés les plus racistes, et, à force d'être antiraciste, devient raciste lui-même. Lourd, parce qu'on attend les rires enregistrés à chaque gag, que les rires ne viennent pas (chez certains, ils viennent, pas chez moi). Lourd également parce que sur un scénario sous-écrit, les comédiens en font 150 fois trop, et personne n'est crédible. Méprisant, parce qu'il assène tous les clichés (la mère arabe qui va à l'école, les délinquants des banlieues qui n'ont que de la gueule et qui sont de véritables couillons, les français qui écoutent de la musique classique et qui sont outrés par la diversité, et j'en passe et des meilleures) avec une supériorité légitime au début, puis de plus en plus inacceptable à mesure que le film avance: nous, Anne Depetrini et Ramzy, avons vécu ça pour de vrai. Et, forts de cette affirmation, ils se permettent d'en rajouter des paquets dans chaque scène, pour nous offrir des moments pitoyables et qui choquent, sans jamais pour autant rattraper les personnages.
Il faut dire que le scénario, s'il avait été mieux écrit, aurait pu se permettre ces multiples scènes. Mais en fait, il aurait fallu trouver des comédiens talentueux, un scénario de fou, une bande-originale qui fasse autre chose que de cacher le vide abyssal du film (à plusieurs reprises, elle cache des dialogues: on voit les personnages s'engueuler et se trémousser, mais sans rien dire puisqu'on entend la BO) et les énormes lacunes dans les dialogues. Sur Canal +, venue faire la promotion de son film dans Le Grand Journal, Depetrini disait que enfin, un film était fait sur ce sujet. Elle n'a pas du regarder bien souvent autour d'elle: son idée est tout sauf originale, des tas de drames et de comédies se sont intéressées (avec beaucoup plus de talent) à l'inter-culturalité dans le couple, dont, il y a 4 ans, une comédie très fine, très drôle et très bien interprétée, Mauvaise foi, le premier film de Roschdy Zem, autrement plus sensible et autrement plus intéressante. Ici, le dénouement est ridicule: dans une cour d'école, Anne Marivin en vient à s'excuser auprès de son cher et tendre. Quand on sait qu'il a une soeur qu'il ne veut plus voir parce qu'elle a accouché d'un bâtard, et que c'est pour ça qu'elle est partie, on est un peu « étonné » de voir que la réalisatrice se dépêtre si facilement de son scénario, très maladroit et sans l'once d'un moindre talent. Please, madame Depetrini, oubliez le cinéma!