JANVIER 2012
EN BREF:
6 films de janvier qui n'ont pas eu le droit, faute de temps, à une critique... Je me rattrappe donc ici sur quatre d'entre-eux, avant de revenir sur The descendants et Café de Flore plus longuement, pour le Festival d'Hiver.
Tahrir, place de la Libération - Stefano Savona.
25 janvier 2012, sortie du film, un an après le début de la révolution égyptienne, quelques jours seulement avant les évènements de Port-Saïd, 74 morts et la crainte que le pays sombre dans le chaos, un an après la chute du Raïs. Forcément, le documentaire est poignant, et entre en résonance dramatique avec l'actualité. L'expérience du film en tout cas est intéressante, une heure trente d'immersion totale parmi ces révoltés, du 25 janvier 2011 à la chute du Raïs, le 11 février 2011. 15 jours de discussions, de colères, de heurts, une armée qui rejoint le peuple, et une euphorie vite dissipée par une question qui semble planer sur les derniers plans du documentaire: "qu'est-ce qu'on fait maintenant?". Aucune voix off, aucune musique, pas de fioritures. L'image de jour est terne, celle de nuit est lumineuse. Il y a quelque chose de chaleureux dans tout cela. Ca scande de partout, la fougue de la lutte est entraînante et suffisante à émouvoir le spectateur, seulement on aurait aimé plus de liant, un peu plus que ce (déjà très intelligent) enchaînement de séquences. Reste tout de même un implacable description d'une agitation, avec ce qu'elle contient de remous et de puissance.
Les papas du dimanche - Louis Becker.
L'histoire est contenue dans le titre, et au moins il ne vend rien de plus, et rien de moins. On voit donc un nouveau divorcé s'habituer à sa garde, un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires. Ca n'a rien de bien passionnant, et rien de bien vilain à la fois. C'est un premier film, d'un fils de et petit-fils de, sous forme d'une chronique sans conséquence. Une image terne, un style pas affirmé du tout, beaucoup de longueurs, compensées par des acteurs convaincants (Thierry Neuvic, Olivier Baroux, Maryline Canto, Hélène Fillières, les enfants), de très jolis moments, et une maladresse constante finalement touchante. C'est tout petit, mais on ne s'ennuie pas, un petit instant comme ça, qui glisse et s'en va. Et comme dirait Télérama, un film ou on trouve Maryline Canto au générique mérite l'indulgence, comme un film ou, à la fin, résonne aux oreilles la superbe reprise du Vent nous Portera de Noir Désir par Sophie Hunger.
Les chants de Mandrin - Rabah Ameur-Zaïmeche.
Dommage. Le cinéaste se propose de portraitiser les contrebandiers d'avant-Révolution française, en en faisant des héros de la liberté et de la fraternité, vagabonds généreux, sans peurs et sans reproches, qui amènent aux quatre vents, outre des livres, pierres précieuses et autres richesses de contrebande, un ouvrage qu'ils ont fait imprimer, "Les chants de Mandrin". Le réalisateur s'intéresse ainsi à une figure hors-la-loi, Mandrin, qu'il élève au rang de légende et de guide. Mais si le parallèle contrebandiers-indignés est effectivement intéressant, comme auront pu le noter quelques critiques, le fond est totalement décrédibilisé par une forme totalement chancelante. Les acteurs paraissent pour beaucoup très amateurs, les dialogues hésitent entre un fumeux vocabulaire XVIIIeme et des phrases qui dénotent sans scrupules avec l'époque, les longueurs sont interminables, comme le film, et les incohérences techniques très nombreuses. Si bien que le film, malgré un intérêt qu'il aurait pu présenter, reste tout de même un supplice. Bien sur il est important qu'il existe, que des films comme celui-ci puissent encore être produits, surtout qu'on aperçoit sans peine ce qu'il aurait pu donner, avec un peu plus de moyens. Des personnages qui trinquent comme cela: "Pour Mandrin. Pour la joie. Pour la beauté de nos rêves", on en veut aujourd'hui, mais entourés d'une beauté cinématographique, d'une écriture solide et d'une réalisation plus nerveuse...
A lire sur le film, la très amusante critique de Chris.
Trust - David Schwimmer.
David Schwimmer s'échine à faire de son film une oeuvre catastrophe sur les dérives de l'Internet. Sauf qu'il n'a ni la force d'écriture d'une excellente série, ni un point de vue qui rend son film original et différent de ce que l'on voit malheureusement trop souvent. Du coup, on se retrouve devant une oeuvre vide d'intérêt, déjà vue, qui alimente une psychose qu'il est inutile d'entretenir, et favorise une paranoïa sur un sujet qui mériterait plus de subtilité. La musique, ce qui était prévisible, dramatise sans cesse le sujet, la mise en scène n'a rien de beau, il n'y a qu'à voir ces effets assez hideux quand deux personnes chattent sur Internet (et évidemment, bleu pour le garçon, rose pour la fille). Bref, une atmosphère malsaine, qui me semble raccoleuse et bien à l'opposé du ton qu'on devrait tenir sur ces sujets délicats. Restent des acteurs plutôt plaisants (Clive Owen et Catherine Keener ne démeritent pas, en revanche Liana Liberato, l'actrice principale, n'est pas crédible), et une partie réussie (celle avec la psychologue, campée par l'excellente Viola Davis). Un film qu'on oubliera bien rapidement.